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épatant patrimoine

Questions de protection

Le patrimoine bâti avignonnais est épatant. Par le nombre et la diversité des édifices qui le composent, mais aussi parce qu’il n’est pas uniquement là où l’on pense le trouver !

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Épatant patrimoine, un voyage au cœur du patrimoine avignonnais en 46 focus...

Épatant patrimoine

Transposition virtuelle de l'exposition

de 2013. 
Mise en ligne

en 2020

La question qui se pose ici est celle de la protection du patrimoine bâti. Celle qui n’a pas été mise en place et que l’on a pu regretter, celle qui est instituée, et celle qui pourrait, peut-être, être instaurée.

Lorsqu’on évoque le « patrimoine avignonnais », chacun pense d’abord au Palais des papes, aux remparts, et au pont Saint-Bénezet, les « trois merveilles d’Avignon » comme les a désignés Hans von Waltheym dans son journal de voyage. Mais à côté de ces « stars » patrimoniales, connues, reconnues, classées et protégées, la ville regorge d’édifices dignes d’intérêt. Certains jouissent déjà d’une reconnaissance publique, officielle et instituée. D’autres se font plus discrets et restent méconnus des Avignonnais eux-mêmes. Il y a aussi ces bâtiments plus récents, ancrés dans l’espace vécu du quotidien, que l’on ne perçoit pas au premier abord comme relevant du patrimoine, alors qu’ils pourraient bien en être… ou en devenir.

Qu’est-ce que le patrimoine ?

Étymologiquement, le patrimoine renvoie aux biens transmis par le père. Cet héritage a une dimension à la fois matérielle...

La fabrication du patrimoine

Le patrimoine est bien le résultat d’un choix, d’une sélection. Ce que l’on considère comme relevant du domaine du patrimoine...

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Parc des expositions Châteaublanc
Gare TGV
Porte Limbert
Ancienne usine EDF
Réglisserie Florent
Lycée agricole François Pétrarque
Palais de Justice
Ecole de la Barthelasse
Piscine olympique du parc des sports
Chambre de l'agriculture
Hôtel du Grand Avignon
Mutuelle sociale agricole
Eglise du Sacré-Coeur
Hospice et résidence Sixte Isnard
Caserne Chabran
Ancienne usine SIPRA
Rotonde SNCF
Eglise paroissiale de Saint-Ruf
Eglise de Montfavet
Moulin Sixte Isnard
HBM Louis Gros
Eglise Saint-Joseph Travailleur
Eglise abbatiale de Saint-Ruf
Châteaux
Bâtiments Art Déco
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Hôtel du Petit Louvre
Couvent du Bon-Pasteur
Caserne des Passagers
Hôtel Madon de Châteaublanc
Hôpital Sainte-Marthe
Berton et Sicard
Manutention des vivres
Grand Bar
Rue des Teinturiers
Le San Miguel
Séminaire Saint-Charles
Maisons quai de la Ligne
Comédie
Synagogue
Prison Sainte-Anne
Hôtel Bernard de Rascas
Hôtel des Postes
Nouvelles galeries
Abbatoirs
Quartier de la Balance
Commanderie des Hospitaliers
Bâtiments Art Déco
Bâtiments Art Déco
Bâtiments Art Déco
Bâtiments Art Déco
Châteaux
Châteaux
Châteaux
Châteaux
Châteaux
Châteaux
Châteaux
Châteaux
Châteaux

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Quelques dates-repères dans l’histoire de la protection du patrimoine bâti

Etablissement des premières listes de monuments historiques sous l’égide du ministre François Guizot et des premiers inspecteurs généraux Ludovic Vitet et Prosper Mérimée. L’objectif principal est alors de répartir les aides financières de l’Etat.

A Avignon, sont inscrits sur ces listes : le pont et la chapelle Saint-Bénezet, la Collégiale et l’église paroissiale Saint-Pierre, le Palais des papes et la cathédrale Notre-Dame des Doms en 1840, l’ancien Hôtel des monnaies et l’Hôtel de ville en 1862.

Adoption d’une nouvelle loi sur les monuments historiques. Elle instaure le classement, sans accord nécessaire du propriétaire, même dans le cas d’immeubles privés. Il s’agit également de prendre en compte les changements qu’implique la loi de séparation de l’Eglise et de l’Etat (1905).

Instauration des « zones de protection ». La loi ne protège plus seulement des bâtiments isolés, elle s’intéresse désormais aussi à des ensembles. C’est le cas, en 1932, à Avignon, de la rue des Teinturiers (sol pavé, platanes, canal et roues à aubes).

Adoption de la « loi Malraux », ministre des Affaires culturelles. Cette loi crée l’Inventaire général des monuments et richesses artistiques de la France. Elle instaure par ailleurs la notion de « secteur sauvegardé ». A Avignon, le quartier de la Balance est alors le plus petit secteur sauvegardé de France.

Adoption de la première lofrançaise sur les monuments historiques.

Instauration d’un nouveau niveau de protection : l’inscription à l’inventaire supplémentaire des monuments historiques. Cette mesure est alors perçue comme une étape préalable au classement.

Adoption d’une loi qui instaure la notion de « champ de visibilité » des monuments historiques. Les architectes des bâtiments de France (ABF) sont chargés de s’assurer que les travaux conduits « aux abords » d’un monument classé ou inscrit ne lui portent pas atteinte.

1842-1875

1913

1930

1962

1887

1927

1943

Retour carte
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Un chapiteau pour le parc des expositions

Le nouveau parc des expositions a été construit à Châteaublanc dans la deuxième moitié des années 1970 en remplacement du palais de la foire situé à Champfleury. Il semblait alors important pour la Municipalité de disposer d’un équipement capable de positionner Avignon sur le marché des foires, salons, congrès et grands événements. On y voyait un levier stratégique pour développer la ville.

 

L’originalité du « Grand Palais » du parc des expositions d’Avignon est sa forme circulaire, en chapiteau. La photographie ci-dessus a été prise pendant la construction de la charpente, véritable ossature de l’édifice qui repose presque directement au sol.

Une telle construction devait tenir compte de contraintes incontournables. Il fallait que le bâtiment soit volumineux. Il devait également être particulièrement modulable et polyvalent afin d’accueillir des manifestations variées.

 

Ainsi, avec ces 27000 m2 de surface totale couverte, le parc des expositions marque la ville et marque aussi une époque. Plus de 30 ans après sa construction, il est en cours de réhabilitation.

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Changements d'usage

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A Avignon plus qu’ailleurs, églises, cloîtres et chapelles médiévales deviennent souvent lieux d’expositions ou de spectacles. Mais cette photographie de 1910 témoigne d’une reconversion plus insolite d’un lieu de culte.

Dîner dans une chapelle gothique 5 ans après la loi de séparation de l’Eglise et de l’Etat ?

L’histoire de la chapelle des Templiers de l’hôtel du Petit Louvre témoigne d’une rencontre entre profane et sacré et de la valeur d’usage d’un lieu. Un monument traverse les siècles avant tout parce qu’il a été utilisé, investi.

 

L’église des Templiers est achevée en 1281. Au 14e siècle, elle devient quelque temps livrée cardinalice, puis la propriété est cédée aux Hospitaliers qui s’y installent en 1379. La maison du temple prend alors le nom de Commanderie Saint-Jean de Rhodes.

Quatre siècles plus tard, en 1793, l’ancienne commanderie est vendue. L’église devient alors une écurie surmontée d’un grenier à foin ! Des chevaux dans une église ? Pendant quelques décennies, car en 1876, elle est restaurée en style néo-gothique à l’initiative du félibre Anselme Mathieu et aménagée en salle de restaurant. Aujourd’hui, l’ancienne chapelle accueille des spectacles pendant le festival.

A Avignon plus qu’ailleurs, églises, cloîtres et chapelles médiévales deviennent souvent lieux d’expositions ou de spectacles. Mais cette photographie de 1910 témoigne d’une reconversion plus insolite d’un lieu de culte.

Hôtel du Petit Louvre
Parc des expositions Châteaublanc
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Avignon à l'heure de l'architecture contemporaine

La nouvelle gare d’Avignon s’inscrit dans un ensemble de projets d’architecture ferroviaire liés au développement d’un nouveau concept de lignes à grande vitesse. Contrairement aux premières gares implantées au 19e siècle à proximité directe des centres-villes, ou de leur adaptation à l’accueil des TGV, le choix fait à la fin du 20e siècle est de bâtir de nouvelles gares, excentrées pour être implantées, sans détour, directement sur la ligne à grande vitesse...

Gare TGV
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La porte Limbert, un patrimoine renié ?

Héritage du temps des papes, les remparts d’Avignon constituent un ensemble protégé depuis maintenant près de 150 ans. Cette protection n’a pas toujours été d’évidence, et, aujourd’hui encore, de petites voix s’élèvent parfois en marge des débats sur les aménagements urbains pour remettre en question sa présence pluriséculaire. Il est certain que les remparts d’Avignon, proportionnés pour protéger la cité médiévale, sont loin d’embrasser la totalité du territoire de la commune et constituent une sorte de frontière intérieure dans une ville qui s’est étendue. Ils gênent l’aménageur !

Le 19e siècle connaît plusieurs menaces liées aux projets de développement urbain, et d’abord plus particulièrement à l’arrivée du train. Esprit Requien s’élève ainsi contre un projet qui implique la démolition de toute une portion de l’enceinte. Il est soutenu par Prosper Mérimée, l’inspecteur général des monuments historiques.

En 1862, les remparts d’Avignon sont inscrits sur la liste des monuments historiques protégés.

Mais bientôt, le maire Gaston Pourquery de Boisserin, qui se veut homme de progrès, travaille sur le tracé du futur tramway. Les remparts le dérangent et il demande l’autorisation d’ « agrandir » plusieurs portes. L’administration des Monuments historiques refuse. Le maire ne tient pas compte de ce refus et donne l’ordre de démolir la Porte Limbert pendant une nuit de juillet 1896.

 

La Porte Limbert est peut-être l’exemple le plus brutal d’atteinte portée à l’ensemble patrimonial que forment les remparts. Sa démolition, comme les brèches percées notamment au bout de la rue du Portail Magnanen, crée une rupture, une blessure dans l’œuvre architecturale.

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Porte Limbert

« Débarrassons-nous de cette enceinte fétide qu’une ridicule admiration voudrait nous imposer pour prison perpétuelle lorsqu’une campagne admirable nous convie à nous mettre en rapport avec elle. »

 

H. Ch. 1833

Indigents, militaires puis apprentis artistes

L’aumône générale fut fondée au 16e siècle par la Ville pour secourir les indigents. L’assistance dissimulait aussi la volonté d’exercer un contrôle sur les plus pauvres dans l’idée d’éviter la délinquance. L’aumône générale fit l’acquisition de bâtiments et de jardins entre la rue des Lices et la rue du Crucifix en plusieurs étapes, entre 1610 et 1748. Jean-Pierre Franque acheva l’édifice en 1854.

L’architecture en « U » décline quatre rangs superposés de galeries en arcades. Ces galeries de deux mètres de large avec des ouvertures en plein cintre peuvent évoquer la forme d’un cloître. Cette disposition traduit surtout la prise en compte des contraintes climatiques que sont le soleil et le mistral.

La chapelle, qui a aujourd’hui disparu, divisait la cour entre l’espace réservé aux femmes et l’espace réservé aux hommes. 400 à 600 personnes étaient accueillies à l’aumône générale, dont deux tiers de femmes.

 

L’édifice devint la Caserne des passagers au 19e siècle. Il hébergeait ainsi les militaires de passage à Avignon. Il fut plus tard partiellement puis complètement dédié à l’école d’art, jusqu’à son déménagement en 1998. L’ensemble a depuis été restauré et transformé en immeuble de logements… aux étonnantes loggias !

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L’aumône générale fut fondée au 16e siècle par la Ville pour secourir les indigents. L’assistance dissimulait aussi la volonté d’exercer un contrôle sur les plus pauvres dans l’idée d’éviter la délinquance.

Caserne des Passagers
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Architecture conventuelle du 18e siècle

En 1702, Jean Madon de Châteaublanc crée la Maison du Bon Pasteur et des Recluses. L’objectif de cette institution, tenue par des religieuses, est de « sortir les prostituées du misérable état de péché ». En effet, parallèlement aux lois qui encadrent la prostitution, les élites locales cherchent à freiner le phénomène en proposant des structures charitables qui accueillent les « repentantes ».

 

L’établissement, à la fois couvent et centre de redressement, impose aux pénitentes un règlement strict. La prière et le travail rythment les journées des femmes. Pour expier leurs fautes, on leur impose aussi « une vie de mortification » (le corps devient un objet de douleur).

La photographie montre l’édifice qui a été construit pour accueillir l’institution du Bon Pasteur à partir de la fin du 19e siècle.

Sa chapelle a été dessinée par l’abbé Pougnet. Ce curé architecte est aussi à l’origine de la cathédrale de Carthage en Tunisie, ou de l’église des Réformés à Marseille.

 

De la même manière qu’au 18e siècle on critiquait l’architecture du 17e siècle en l’opposant à la finesse de l’architecture médiévale, le 20e siècle a souvent boudé les constructions du 19e siècle. Ce désintérêt a provoqué la destruction de nombreux édifices remarquables, notamment lorsque leur emplacement était stratégique. La maison du Bon Pasteur était un bâtiment conventuel sobre, solennel et bien exécuté. Il n’a pas fait l’objet de protection et a été démoli à la fin des années 1980.

Couvent du Bon-Pasteur
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Déclinaison avignonnaise des mouvements Art Nouveau et Art Déco 

L’Art Nouveau est caractérisé notamment par l’emploi de courbes, l’exubérance et l’utilisation de motifs végétaux. Il s’est développé à la fin du 19e et au début du 20e siècles mais a connu peu d’applications à Avignon.

 

En revanche (et contrairement à certaines idées reçues), l’Art Déco, qui s’est développé à partir des années 1920, a inspiré plusieurs bâtiments de la ville. Le style Art Déco se caractérise par l’utilisation de formes géométriques à la fois pures et dynamiques. C’est un mouvement qui s’ancre dans la modernité et qui trouve des déclinaisons tant dans l’architecture, que dans l’art ou le mobilier.

L’architecture Art Déco s’est affirmée dans les quartiers où l’on a construit le plus dans la période 1920-1940 : en particulier, pour l’extra-muros, à la Trillade, Saint-Ruf, Monclar, Saint-Jean ou aux Sources.

Il ne s’agit pas toujours d’édifices entiers construits dans ce style. Mais ce sont plus souvent des détails de ferronnerie, des encadrements de portes ou de fenêtres, une marquise, qui inscrivent le bâtiment dans l’air du temps en employant les codes du mouvement Art Déco.

L’architecture Art Déco s’est affirmée dans les quartiers où l’on a construit le plus dans la période 1920-1940 : en particulier, pour l’extra-muros, à la Trillade, Saint-Ruf, Monclar, Saint-Jean ou aux Sources.

Bâtiments Art Déco
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Vies de châteaux

A Avignon, on parlait parfois de château pour désigner une demeure bourgeoise située à la « campagne », comme on disait alors pour parler de l’extra-muros. Le terme désignait aussi des maisons de maîtres, sièges d’exploitations agricoles. L’édifice s’intégrait à un ensemble. Le parc en faisait pleinement partie.

 

Plusieurs châteaux n’existent plus (Saint-Paul). D’autres ont trouvé un nouvel usage. A Montfavet, ce nouvel usage est parfois en lien avec l’hôpital (Saint-Ange). Des parcelles ont été remodelées et certains châteaux ont perdu leur vaste parc.

Châteaux
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Un intérêt tardif pour les hôtels particuliers

Jean-Pierre Madon de Châteaublanc, le commanditaire de l’édifice, est aussi à l’origine de la fondation du couvent du Bon Pasteur. Au 19e siècle, le riche négociant et industriel Sixte Isnard rachète l’hôtel particulier. Il devient plus tard la propriété des Palun. C’est ce nom qui figure sur les gravures ci-contre.

L’hôtel Madon de Châteaublanc se trouve rue Banasterie. Il est bâti à la fin du 17e siècle (1687). Pierre II Mignard est l’architecte de cet édifice directement inspiré du schéma de Mansart pour l’hôtel Carnavalet à Paris. La question de savoir si cette volonté de « copie » est celle de l’architecte ou celle du commanditaire n’est d’ailleurs pas tranchée.

 

Le plan est classique (en « U ») mais les deux ailes sont reliées par une portion plus basse qui sépare la cour intérieure de la rue. La façade est très équilibrée. La cour intérieure présente une très belle calade (mosaïque en galets) d’Henri Barrelet où figurent des comètes, références à la comète observée par Edmond Halley en 1758. Cet hôtel particulier est souvent considéré comme le chef-d’œuvre de Mignard en matière d’architecture privée. Jean-Pierre Madon de Châteaublanc, le commanditaire de l’édifice, est aussi à l’origine de la fondation du couvent du Bon Pasteur.

Au 19e siècle, le riche négociant et industriel Sixte Isnard rachète l’hôtel particulier. Il devient plus tard la propriété des Palun. C’est ce nom qui figure sur les gravures ci-contre.

Avignon possède un nombre important d’hôtels particuliers des 17e et 18e siècles. Cependant, il est intéressant de remarquer que les édifices de cette période ont mis du temps à être considérés comme patrimoine à protéger. L’administration des monuments historiques s’est en effet longtemps focalisée sur le patrimoine architectural du Moyen Âge.

L’hôtel Madon de Châteaublanc a ainsi été inscrit à l’inventaire supplémentaire des monuments historiques en 1932 et a attendu 1983 pour être classé.

Hôtel Madon de Châtaublanc
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Des logements dans l’ancienne usine électrique

L’histoire de la production d’électricité à Avignon est directement liée à l’histoire du tramway. L’usine électrique de la route de Lyon, clos Saint-Véran, est construite en 1905, juste à côté de l’entrepôt des trams. Son rôle premier est effectivement de fournir une alimentation au réseau de tramway à « traction électrique par réseau aérien ». En 1911, 1,8 millions de voyages en trams sont comptabilisés sur le réseau.

 

Cette double implantation (usine électrique et dépôt des trams) a durablement marqué la ville. Aujourd’hui, 80 ans après la fin de la circulation des anciens trams, on parle encore du « Clos des trams » pour désigner le quartier.

 

L’usine électrique a été plusieurs fois restructurée pour s’adapter aux évolutions. En 2004-2005, le groupe Bouygues rachète les anciens locaux dans le cadre d’un projet immobilier : l’usine électrique est conservée et transformée en résidence privée.

Ancienne usine EDF

L’église sans clocher

Non loin de l’Abbaye médiévale de Saint-Ruf, l’église paroissiale du même nom a été bâtie peu après la loi de séparation de l’Eglise et de l’Etat (1905). La photographie ci-dessus, bien connue, a probablement été prise le jour de la bénédiction de l’église, en 1912.

Sa construction témoigne de l’urbanisation progressive des quartiers de la « banlieue » d’Avignon, mais aussi d’un contexte de tensions entre ceux qui étaient favorables à la laïcité et ceux qui s’y opposaient. Comme la commune, qui bâtissait des écoles dans les nouveaux quartiers, l’archevêché travailla à implanter des lieux d’enseignement du catéchisme au plus près des enfants. Avant la construction de l’église de Saint-Ruf, les catholiques allaient parfois à la messe à Saint-Didier, intra-muros. Les habitants du centre-ville d’Avignon s’interrogeaient d’ailleurs sur le projet de bâtir une église « en pleine campagne ».

 

Pour des questions financières, l’édification du clocher de l’église Saint-Ruf fut reportée. Une souscription a même été ouverte pour collecter les fonds nécessaires, mais n’a encore jamais abouti.

Non loin de l’Abbaye médiévale de Saint-Ruf, l’église paroissiale du même nom a été bâtie peu après la loi de séparation de l’Eglise et de l’Etat (1905). La photographie ci-dessus, bien connue, a probablement été prise le jour de la bénédiction de l’église, en 1912.

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Eglise paroissiale de Saint-Ruf
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Le lycée agricole de Cantarel : une architecture d’avant-garde

Le lycée construit de 1966 à 1969 par les architectes Roland Bechmann, Pierre Biscop, Charles André et François Girard est en rupture totale avec l’architecture scolaire alors en vigueur. Tandis qu’à cette époque le modèle du bâtiment scolaire « en barre » s’impose dans la majorité des projets, le plan du lycée de Cantarel s’organise « en ailes de moulin ». Les différents bâtiments s'articulent autour d'un noyau central, affecté aux services généraux, pour former un complexe scolaire : salles de classe et laboratoires, bâtiments d’internat, infirmerie, réfectoire, ensemble socioculturel et sportif.

 

Cet édifice, commandité par le ministère de l’agriculture, place l’élève au centre du projet. Dans un contexte d’essor des métiers de l’agriculture dans le Vaucluse, le nouveau lycée a pour vocation un accueil en pension complète.

Les architectes intègrent cette contrainte en faisant de cet établissement un véritable lieu de vie dont les élèves doivent être les acteurs majeurs. L’ensemble architectural traduit un renouveau dans les conceptions pédagogiques et éducatives.

Autre domaine d’avant-garde, le souci d’intégrer l’architecture dans son environnement naturel guide la réflexion de l’architecte. La recherche de la fonctionnalité et la mise à profit des contraintes marquent son travail. On voit chez Roland Bechmann un souci réellement précoce pour l’environnement. Le lycée Cantarel se trouve alors dans un secteur très peu urbanisé, à dominante agricole.

 

Résolument visionnaire, il est aujourd’hui encore considéré comme une réussite sur le plan fonctionnel. Il a reçu le label patrimoine XXe siècle et est inscrit à l’inventaire supplémentaire des monuments historiques.

Lycée agricole François Pétrarque
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La réglisserie Florent à Cantarel

La notion de patrimoine industriel s’est développée tardivement. Elle traduit la prise de conscience du fait que les lieux de fabrication, de travail et de vie ouvrière marquent pleinement la société et l’histoire. La désindustrialisation a joué un rôle important dans cette prise de conscience. La disparition massive d’usines a provoqué un sursaut protecteur tardif.

 

La façade principale de la réglisserie Florent est restée sensiblement intacte depuis sa fermeture, en 1975, résultant de son rachat par Ricqlés Zan.

Cette ancienne usine forme un ensemble de belle facture. Elle est construite sur le modèle paternaliste de nombreuses usines du 19e siècle : la fabrique intégrait un espace où étaient logés les ouvriers et les ouvrières (dortoirs, réfectoire, infirmerie, etc.).

L’ensemble devient alors plus qu’un lieu de travail. Il traduit la volonté de disposer sur place d’une main d’œuvre dédiée. Les ouvriers-paysans se partageaient entre les travaux agricoles, aux beaux jours, et l’usine, le reste de l’année, le salaire ouvrier permettant souvent l’achat de matériel agricole.

 

La photographie ci-contre souligne aussi la notion de patrimoine scientifique et technique. La réglisserie Florent a fabriqué des bâtons de réglisse, de la pâte de réglisse et du jus de réglisse avant d’innover dans la fabrication de bonbons à la menthe, à la vanille, à l’anis et à la violette. Pour fabriquer ces nouvelles pastilles, dans les années 1870, en plus d’une nouvelle usine édifiée selon ses propres plans, Paul Florent fait construire des machines spécialement conçues pour son projet.

Réglisserie Florent

« Il y a deux choses dans un édifice : son usage et sa beauté. Son usage appartient au propriétaire, sa beauté à tout le monde, à vous, à moi, à nous tous. Donc le détruire c'est dépasser son droit. ».

 

Victor Hugo, « Guerre aux démolisseurs » Revue des Deux Mondes, 1832.

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Ensemble géométrique

Les chambres de l’agriculture ont été créées dans les années 1920. Chargées de représenter les différents agents économiques de l’agriculture, elles ont aussi pour rôle d’appliquer les politiques de développement agricole et rural sur le territoire. Elles sont implantées à l’échelle des départements.

 

La chambre de l’agriculture de Vaucluse est installée à Agroparc depuis 1988. L’édifice est monumental. Sept colonnes rythment le porche devant la façade principale vitrée, provoquant un intéressant jeu de reflets. L’utilisation du granit pour recouvrir les murs ajoute au caractère imposant du bâtiment.

 

Peut-on considérer que cet édifice comptera pour les Avignonnais de demain ? Le plan général est original. Le bâtiment principal, triangulaire autour d’un puits de lumière, rejoint par une pointe le bâtiment adjacent, rectangulaire. Les espaces extérieurs apportent une circularité, autour de ce point de jonction.

Chambre de l'agriculture
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Manutention des vivres

L’histoire de l’ensemble bâti que l’on appelle communément « la Manutention » est directement liée à l’implantation d’unités militaires au palais des papes au moment de la Révolution française. La tour Trouillas, longée par les anciens jardins de Clément VI, hébergeait ateliers, cantines, magasins et lavabos militaires. Le Génie acheva vers 1824 un bâtiment en forme de "L" : la première manutention. Le plan ci-contre nous montre ce bâtiment en 1864. Il nous indique la présence des magasins (habillement notamment) du 50ème régiment, d’une paneterie et de boulangeries, ainsi que de locaux dévolus à l’infirmerie.

De 1972 à 1985 environ, la Ville d’Avignon affecte le bâtiment en L aux ateliers des fêtes et aux entrepôts du festival. Elle entreprend ensuite une nouvelle et complète restauration du site et crée un centre d'artisanat d'art, inauguré en 1986.

Un deuxième bâtiment a été construit au début des années 1880 pour agrandir la manutention militaire. Il n’est pas représenté sur le plan. Il est situé tout près de la manutention de 1824 et accueille aujourd’hui le cinéma Utopia.

 

Les deux manutentions témoignent ensemble de la reconversion réussie de bâtiments militaires en édifices à vocation culturelle et artistique. Ils attestent également l’importance de la présence militaire sur le territoire avignonnais.

Le plan ci-dessus nous montre ce bâtiment en 1864. Il nous indique la présence des magasins (habillement notamment) du 50ème régiment, d’une paneterie et de boulangeries, ainsi que de locaux dévolus à l’infirmerie.

Manutention des vivres
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De l’hospice à l’université

Louise et Bernard de Rascas fondèrent un hospice (c’est-à-dire un hôpital) en 1354. L’institution devint hospice municipal dès la fin du 15e siècle. En 1667 commençait une série de chantiers échelonnés sur plus de 150 ans. Certaines interrogations demeurent aujourd’hui pour savoir quels sont les architectes qui ont travaillé sur le projet et sur sa réalisation.

 

Jean-André Borde commença la construction, mais pendant cinq mois seulement. On lui doit notamment l’escalier d’honneur. François d’Elbène prit sa suite, puis Jean Péru (plutôt que Paul de la Valfenière, à qui l’on a longtemps attribué la paternité de la façade). Jean-Baptiste Franque est lui aussi intervenu sur la partie droite de la façade. François Franque a dessiné le grand portique, qui équilibre et monumentalise la somptueuse façade de 175 mètres, toujours admirée de nos jours.

 

L’édifice a fonctionné comme hôpital jusque dans les années 1980. Sous le mandat du maire Henri Duffaut, il a déménagé au sud d’Avignon, loin des remparts et près de la Durance.

 

Les 17000 m2 libérés par l’hôpital de la Ville firent l’objet d’une reconversion spectaculaire. L’université y a effectivement emménagé en 1997, après d’importants travaux pour adapter l’édifice à ses nouvelles attributions. Un bâtiment contemporain a aussi été construit, en face de l’ancien. L’installation de l’université sur ce vaste site a mis fin à sa dispersion sur une dizaine de lieux différents.

Hôpital Sainte-Marthe
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Renouveau de l’architecture judiciaire

Face aux remparts, depuis 2001, le palais de justice d’Avignon assoit ses volumes francs avec force mais harmonie. Il s’impose avant tout parce qu’il ne ressemble à rien d’autre, mais aussi grâce à son gabarit, sa masse. Il affirme la solennité de l’exercice de la justice.

C’est à Adrien Fainsilber, le dessinateur de la Géode parisienne, que l’on doit le nouveau palais de justice d’Avignon. Cet édifice est représentatif d’un récent mouvement de construction de tribunaux en France. Ce mouvement répond à la nécessité de « sortir des anciens palais » pour adapter les lieux de justice aux évolutions des institutions judiciaires et à leurs modes de fonctionnement contemporains. Les locaux de l’ancien tribunal avignonnais sont aujourd’hui occupés par le Conservatoire du Grand Avignon.

Face aux remparts, depuis 2001, le palais de justice d’Avignon assoit ses volumes francs avec force mais harmonie. Il s’impose avant tout parce qu’il ne ressemble à rien d’autre, mais aussi grâce à son gabarit, sa masse. Il affirme la solennité de l’exercice de la justice.

 

On perçoit donc dans ce monument contemporain la volonté de créer un événement architectural. L’édifice doit être structurant et très facilement identifiable. Il ne peut être confondu avec un autre, il ne peut être anonyme. Il s’agit du bâtiment qui rappelle à l’ordre, qui garantit la justice et l’exercice de la démocratie. Les éléments de symétrie peuvent évoquer la traditionnelle symbolique de la balance.

Contrepoint de l’autre côté du boulevard Limbert, l’installation de l’artiste Brigitte Nahon semble faire référence à cette symbolique. On y voit une balance formée de boules en acier inoxydable posées sur un plateau lui-même posé sur une autre sphère.

Palais de Justice
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L’utilisation : menace ou protection ?

L’abbaye Saint-Ruf a été bâtie au Moyen Âge, avant l’installation des papes à Avignon. En 1039, quatre chanoines d’Avignon demandèrent à se retirer à la campagne pour y mener une vie plus austère. La communauté fut d’abord placée sous la règle de Saint-Augustin. Puis, en 1095, l’ordre de Saint-Ruf fut reconnu.

 

Comme elle n’était pas protégée par les remparts d’Avignon, l’abbaye de Saint-Ruf fut fortifiée. On remarque ainsi les créneaux et les meurtrières sur le transept de l’église. L’église de Montfavet, dans une configuration similaire, était elle aussi fortifiée.

La photographie ci-dessous témoigne de la réutilisation de l’ancienne abbaye en usine. L’édifice religieux est devenu complètement profane. Au premier plan on devine un champ d’épandage qui n’était pas sans faire débat. Le deuxième usage du lieu l’a-t-il protégé de la démolition ou a-t-il participé à la disparition d’éléments d’origine ? Sans doute un peu des deux…

La photographie ci-contre témoigne de la réutilisation de l’ancienne abbaye en usine. L’édifice religieux est devenu complètement profane. Au premier plan on devine un champ d’épandage qui n’était pas sans faire débat. Le deuxième usage du lieu l’a-t-il protégé de la démolition ou a-t-il participé à la disparition d’éléments d’origine ? Sans doute un peu des deux…

 

Dans le parc de Saint-Ruf, il ne reste aujourd’hui que le clocher, le transept, le chevet et le départ de la nef de l’église abbatiale. Ces vestiges de l’abbaye médiévale ont été classés monument historique dès 1887.

Eglis abbatiale de Saint-Ruf
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Deux atlantes dans une quincaillerie

Le Berton et Sicard du centre-ville a longtemps été une institution avignonnaise. Cette vaste boutique de bricolage, ménage, chauffage et quincaillerie était établie dans l’ancien hôtel Peilhon de Faret, bâti à la fin du 17e siècle. L’édifice donne à la fois rue de la Rappe et rue du Vieux Sextier.

Les Avignonnais de longue date se souviennent de cette enseigne comme d’une véritable caverne d’Ali Baba. On l’appelait « Berton », et plus tard elle est devenue « Quimo », bien que demeurant propriété de la société Berton et Sicard.

 

La quincaillerie de l’intra-muros n’a pas résisté à l’arrivée de la concurrence des grands magasins de bricolage des zones commerciales et a été remplacée, à partir des années 1990, par des magasins de prêt-à-porter.

 

La grande particularité de cette boutique est qu’elle renferme deux magnifiques atlantes. Les atlantes sont l’équivalent masculin des cariatides. Il s’agit de statues servant de supports verticaux, ici à un plafond. Il semblerait que la réalisation de ces deux atlantes soit inspirée des statues que Pierre Puget a réalisées en 1656 à l’entrée de l’ancien hôtel de ville de Toulon. Ce sont des allégories de la Force et de la Fatigue.

 

Les atlantes ont fait l’objet d’une inscription à l’inventaire supplémentaire des monuments historiques dès 1932. En revanche, les façades et la toiture ont dû attendre 1988. Une mesure plus précoce aurait peut-être permis d’éviter des interventions très agressives sur le bâtiment dans les années 1960.

Berton et Sicard
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Des lieux de convivialité comme patrimoine

En 1854, Bresset ouvrit le Café de l’Univers à l’emplacement du vieux Café Thomas, sur le côté Nord de la place de l’Horloge. Jean-Pierre Cœur en faisait l’acquisition peu de temps après, lui donnant le nom de Café Cœur.

En 1942, l’établissement prit le nom de Grand Bar du Centenaire, en référence au monument érigé sur la place en 1891 pour commémorer le rattachement d’Avignon et du Comtat Venaissin à la France.

 

Ornée de sculptures d’Etienne Cournaud père, la façade du Grand Bar était remarquable. Elle n’a pourtant pas fait l’objet de protection. L’édifice a été intégralement démoli en 1969, dans le cadre de la rénovation de l’îlot P du quartier de la Balance. Seuls les deux atlantes de la salle furent alors déposés dans un café du cours Jean-Jaurès. Ils sont tout ce qu’il reste de ce haut lieu de sociabilité.

 

Un seul ancien café avignonnais a intéressé l’administration en charge de la protection du patrimoine. L’ancienne salle de café du 26 rue du Portail Matheron, aujourd’hui agence bancaire, est inscrit à l’inventaire supplémentaire des monuments historiques depuis 1991.

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Grand Bar
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L’architecture comme sculpture

La particularité de ce chantier réside dans le fait que Max Bourgoin y est son propre commanditaire. Le terrain lui appartient. Il devient un terrain de jeu et d’expression libre de l’architecte.

« Pierre sciée », « pierre éclatée », « croûte de pierre », « pierre massive brute », « empreintes », « briques » sont quelques exemples de légendes des documents techniques de la construction du San Miguel. Max Bourgoin, l’architecte, conçoit son édifice comme une véritable sculpture qui garde l’empreinte de l’homme et des outils de l’artisan. Il aime travailler la « peau du bâtiment ».

La particularité de ce chantier réside dans le fait que Max Bourgoin y est son propre commanditaire. Le terrain lui appartient. Il devient un terrain de jeu et d’expression libre de l’architecte. Le San Miguel fait face aux remparts et s’intègre particulièrement bien à son environnement.

 

C’est une résidence « haut de gamme » qui comprend des logements et des bureaux. Max Bourgoin y a choisi des matériaux nobles et de qualité. Tout compte : les volumes, les cheminements intérieurs et la lumière.

Chaque logement doit avoir une loggia ou une terrasse et bénéficier d’une double-exposition. Les volumes sont ouverts. Disparu en 2009, Max Bourgoin n'a construit que dans le Vaucluse ou dans la région d'Avignon. Il est l’architecte de nombreux bâtiments avignonnais : immeubles et école Sixte Isnard, Groupama, Inspection académique, immeubles de logements sociaux à Champfleury, Monclar, etc. Il est un architecte incontournable de la reconstruction et de l’après-reconstruction à Avignon. Le San Miguel peut certainement être considéré comme son chef d’œuvre d’artisan-architecte. C’est en tout cas une œuvre qui illustre parfaitement son caractère inclassable, atypique.

 

Le San Miguel a été construit entre 1968 et 1988. Il est labellisé Patrimoine XXe siècle depuis 2000 mais ne fait pas, à ce jour, l’objet d’une protection au titre des monuments historiques.

Le San Miguel
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Le premier théâtre avignonnais

Avant 1732 et l’inauguration de la Comédie, place Crillon, Avignon ne possédait pas de lieu spécifiquement dédié au théâtre. L’édifice a été construit selon les plans de l’architecte parisien Thomas Lainée. Son financement est dû au regroupement de riches Avignonnais au sein d’une société par action.

La Comédie resta en fonction jusqu’à la construction d’un nouveau théâtre, place de l’Horloge.

 

Sur la photographie ci-contre, le bâtiment de l’ancienne Comédie est toujours présent, mais a complètement changé d’activité. Il accueille alors la sellerie-carrosserie Bondurand. La façade que l’on voit ici a été largement modifiée et banalisée par rapport à celle d’origine : des fenêtres ont été percées, notamment sur les décors sculptés du fronton, un balcon et un étage ont été ajoutés.

 

A la fin des années 1970, lors d’une campagne de restauration, on a tenté de rendre à la façade son aspect initial. On a alors choisi d’effacer un pan de l’histoire de l’édifice pour rétablir sa beauté d’origine.

 

Cette photographie montre aussi l’harmonie et l’équilibre de la place qui met en valeur l’édifice. Le monument est-il isolable de ce qui l’entoure ?

Comédie

Patrimoine républicain

L’école de l’île de la Barthelasse s’inscrit de manière évidente dans le patrimoine communal et républicain. Après les lois Ferry qui instituent l'enseignement laïque, gratuit et obligatoire pour les filles comme pour les garçons, la France assiste en trois décennies à une véritable vague de construction. L’école républicaine de la fin du 19e siècle est un très bon exemple de ce qu’on appelle l’architecture de répétition. Fortement symboliques, les écoles de cette période se déclinent en quelques modèles. Leur architecture doit frapper, étonner, voire impressionner les yeux de l’enfant. Avec la mairie, l’école est le nouveau « temple » de l’ordre républicain...

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« Petit patrimoine » et impératifs touristiques

Depuis le 14e siècle, les remparts ceinturent le centre-ville d’Avignon sur 4600 mètres. Ou plutôt, sur 4330 mètres, puisque 270 mètres de l’enceinte sont constitués par le rocher des Doms.

 

Au 18e siècle, la roche est travaillée pour aménager une route le long de cette muraille naturelle. Des immeubles s’installent ainsi au nord de l’enceinte, tournés vers le fleuve et vers la vie du port. Collés au rempart et à la roche, ils font face au vent du nord et au Rhône. On trouve parmi eux les magasins du port, construits selon les plans de Jean-Baptiste Franque.

 

Mais dans les années 1970, les immeubles sont peu à peu démolis. Le témoignage d’un pan de la vie économique en lien avec le fleuve disparaît. Le rocher est mis à nu. Il est percé de deux ouvertures en 1974, afin de créer un accès vers le parking du Palais des papes. Les bâtiments avaient pourtant fait l’objet d’inscriptions à l’inventaire supplémentaire des monuments historiques 40 ans plus tôt.

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Maisons quai de la Ligne
Ecole de la Barthelasse
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Patrimoine du XXIe siècle ?

Un édifice des plus contemporains, sorti de terre il y a moins de 10 ans peut-il déjà être considéré comme du patrimoine ? L’hôtel communautaire du Grand Avignon, conçu par les architectes Jean-Michel Weck et Jacques Fradin, nous ferait volontiers l’affirmer ! Mais l’usage veut que l’on ne classe pas un édifice du vivant de son concepteur. Et l’administration des Monuments historiques considère qu’un certain recul est nécessaire pour apprécier les qualités d’une construction avec sérénité.

Route de Marseille, il est bien difficile de passer à côté sans le remarquer. Les trois niveaux de ce bâtiment administratif semblent presque suspendus. Les proportions sont justes et équilibrées, les lignes belles et épurées. La façade est animée par le jeu des pare-soleils en verre aux couleurs vives qui changent de position au hasard des volontés. En les actionnant depuis les bureaux, le personnel agit directement sur l’aspect de l’extérieur. Tout un symbole !

 

Ce bâtiment n’est ni écrasant ni imposant. Son architecture affirme l’image d’un lieu de travail au service de la population, accessible, sérieux et innovant. La façade route de Marseille, clairement atypique, dote le bâtiment d’une réelle identité : on ne peut pas confondre cet édifice avec un autre. Il a une personnalité.

Hôtel du Grand Avignon
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Témoignage de la carrière d’Ancien Régime

La notion de patrimoine pose la question de ce que l’on veut transmettre mais aussi de ce que l’on ne veut pas laisser à l’oubli. Nombre d’édifices cultuels sont considérés comme des objets de patrimoine. S’il est une chose qui transcende le temps, c’est la religion : ses codes, ses rites, ses symboles et les lieux dans lesquels elle s’exerce, s’apprend et se transmet.

 

La synagogue d’Avignon témoigne de la présence pluriséculaire d’une communauté juive à Avignon. Elle est la marque de l’existence d’un « ghetto juif », « juiverie » ou « carrière » près de l’église Saint-Pierre dès le 13e siècle. Ce ghetto est fermé par trois portes jusqu’en 1791.

Chassés de France à la fin du 14e siècle, les Juifs sont officiellement acceptés dans les « carrières » ou ghettos dédiés des territoires pontificaux comme Avignon. La Révolution française, dans l’idée de l’égalité des hommes, accorde la citoyenneté aux Juifs.

 

Dans les années 1760, une synagogue est rebâtie, déjà à l’emplacement de celle que nous connaissons aujourd’hui. Les plans sont dessinés par Jean-Baptiste Franque. Mais un incendie dévaste complètement le bâtiment en 1845. Dès l’année suivante, sa reconstruction est initiée selon les plans, cette fois-ci, de l’architecte de la Ville, Auguste Joffroy.

Une des particularités de la synagogue avignonnaise réside dans sa forme circulaire et dans sa rotonde. Dans un style néoclassique, elle se démarque des autres bâtiments religieux avignonnais et propose des formes architecturales qui tranchent avec celles du quartier.

Une des particularités de la synagogue avignonnaise réside dans sa forme circulaire et dans sa rotonde. Dans un style néoclassique, elle se démarque des autres bâtiments religieux avignonnais et propose des formes architecturales qui tranchent avec celles du quartier.

Synagogue
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Trois bassins dans une « demi-coupole renversée »

Un ovni à Saint-Chamand ? Résolument moderne, la piscine dessinée par les architectes Albert Conil et André Remondet tient compte des contraintes locales. Dans un entretien de 1975 pour le bulletin municipal, Albert Conil s’explique sur une originalité de l’édifice : « La nappe phréatique est à 1,50 m de profondeur. Si on creuse des bassins, le seul fait de les vider pour les nettoyer entraîne des poussées de la nappe qui les écrase. Nous les avons donc surélevés, et les vestiaires et annexes ont été placés dessous »...

Renseignez-vous sur les évolutions récentes de cet édifice !

Piscine olympique du parc des Sports
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Un ensemble protégé

Très tôt dans l’histoire de la protection du patrimoine bâti, la rue des Teinturiers est protégée comme un « tout » indissociable.

Très tôt dans l’histoire de la protection du patrimoine bâti, la rue des Teinturiers est protégée comme un « tout » indissociable.

En effet, les façades de la « rue des roues » font l’objet d’un classement dès 1927. Cinq années plus tard seulement, le sol pavé, la rangée de platanes, le canal, ainsi que les roues à aubes les rejoignent pour former un ensemble patrimonial cohérent. On parle alors d’une protection au titre des « monuments naturels et sites à caractère artistique, historique, scientifique, légendaire ou pittoresque ».

 

Cette décision découle directement d’un texte de 1930 qui vient compléter la loi de 1913 en prenant en compte des ensembles composés et en s’intéressant à la notion de paysage. Ce classement doit aussi être rattaché à un recensement des « monuments dignes d’intérêt, à protéger ou à mettre en valeur », établi par le conservateur du Musée Calvet, Joseph Girard. Celui-ci propose une vision élargie de la notion de patrimoine et s’intéresse largement à la période post-pontificale.

 

La préoccupation de Joseph Girard pour les ensembles patrimoniaux trouve cependant des contradicteurs. Léopold Busquet ou Charles Pascal, par exemple, considèrent, à la même époque, qu’un nombre limité de monuments doivent faire l’objet d’une protection. Et même, ils sont favorables à la destruction de certains monuments « de moindre intérêt » pour favoriser une meilleure visibilité des hauts lieux du patrimoine.

 

La photographie ci-contre s’intéresse tout particulièrement à un bâtiment industriel de la rue des Teinturiers. Il s’agit d’un ancien moulin à soie transformé au 20e siècle en tannerie.

Rue des Teinturiers
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L’architecture religieuse du 18e siècle méprisée ?

Le séminaire Saint-Charles de la Croix est un édifice religieux bâti au début du 18e siècle pour une communauté de frères. Les architectes avignonnais Jean-Baptiste et François Franque en dessinent les plans. A la Révolution française, le couvent est lui aussi transformé en caserne militaire. Plus tard, la Préfecture y installe de nombreux services.

Mais en 1955, l’ancien séminaire est démoli dans sa quasi-totalité. Seule la chapelle est épargnée. Elle héberge, depuis les années 1980, un lieu d’exposition du Conseil général.

 

Au-delà d’une conscience patrimoniale moins prégnante au milieu du 20e siècle, cette démolition brutale montre l’indifférence, alors assez répandue, pour l’architecture des 18e et 19e siècles. Le séminaire Saint-Charles était un exemple complet et abouti d’un ensemble religieux du 18e siècle.

Séminaire Saint-Charles
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Un bâtiment très « années 70 »

La Mutuelle Sociale Agricole (MSA) s’est construite sur le principe du mutualisme. Il s’agit d’utiliser les cotisations des membres dans une démarche de prévoyance, de solidarité et d’entraide. Une mutuelle n’a pas pour vocation de s’enrichir elle-même : elle est à but non lucratif. Comme son nom l’indique, la MSA s’adresse aux professionnels du monde agricole, nombreux en Vaucluse.

Dans les années 1970, un nouveau bâtiment est construit pour accueillir l’antenne vauclusienne de la MSA. Les architectes Albert et Lucien Conil sont en charge du projet. Le père et le fils dessinent un édifice qu’ils veulent « dans l’air du temps ». Et c’est bien le cas. En verre et en acier, la construction combine des formes hexagonales et triangulaires et crée un jeu de volume, de lumières et de reflets.

Mutuelle sociale agricole

Le Sacré-Cœur bombardé

En 1925, l’église du Sacré-Cœur est achevée, dans le quartier des Rotondes. Cette construction répond à une demande de la communauté catholique exprimée à la fin de la Grande Guerre : c’est une église votive. Elle s’inscrit dans un mouvement d’opposition à l’anticléricalisme ambiant, ainsi que dans un contexte d’érection de nouvelles églises dans les banlieues urbaines françaises.

 

Moins de 20 ans plus tard, le 27 mai 1944, le Sacré-Cœur subit de plein fouet les bombardements aériens de la fin de la Seconde Guerre mondiale. L’église se trouve en effet dans un secteur stratégique d’Avignon. Les infrastructures ferroviaires sont visées : rotondes des trains et voies ferrées.

 

C’est seulement en 1959-1960 qu’une nouvelle église est édifiée, à l’emplacement de l’ancienne. Les temps sont à la reconstruction. La préoccupation est alors focalisée sur la fonctionnalité et la modernité de l’édifice. La volonté n’est pas de reconstruire à l’identique un « patrimoine blessé ». Il s’agit plutôt de restituer, dans de brefs délais, un lieu de culte aux habitants d’un quartier éprouvé par les dommages de guerre. Par ailleurs, la modestie du nouvel édifice se veut être un rappel à la pauvreté évangélique : béton brut, structure apparente, simplicité des formes.

L’architecture de cette église s’inspire du style romano-byzantin (comme, par exemple, l’église du Sacré-Cœur de Montmartre, à Paris) : coupole, nef unique, tours-clochers. La volonté est de bâtir une église grandiose. Et bien que la réalisation soit un peu moins spectaculaire que le projet initial, cette église marque un réel renouveau dans la construction des édifices religieux à Avignon.

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Eglise du Sacré-Coeur
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De l’hospice du 19e siècle aux immeubles des années 1960

François Balthazar Sixte Isnard (1793-1845), riche négociant de soie, légua sa fortune à la Ville, à la condition qu’elle édifie un hospice de bienfaisance pour les ouvriers taffetassiers, « ouvriers garanciers, négociants ruinés, et commis négociants malheureux » sur son domaine de la Triade, juste au sud de la voie ferrée.

L’hospice fut inauguré en 1854. Réquisitionné par les Allemands pendant la Seconde Guerre mondiale, il servit au logement de 30 familles sinistrées après la guerre. Autour, des baraquements furent bâtis dans le même but...

Hospice et résidence Sixte Isnard

« L’industrialisation du bâtiment (…) gagne ses lettres de créance, et ceux qui, comme moi, en ont été les pionniers ne peuvent que s’en réjouir. Elle est la seule solution à la crise du logement dans le cadre de la législation et des normes de prix qui réglementent l’accession individuelle à la propriété ».

 

Max Bourgoin

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Une nouvelle caserne à l’aube du 20e siècle

Ville de garnison, Avignon compte de nombreux édifices dont la destination première ou l’histoire est liée à l’armée. La construction de la caserne Chabran répond à la nécessité, pour les militaires, de libérer le Palais des papes qu’ils avaient investi au moment de la Révolution française. Mais il est intéressant de noter, que comme pour la caserne Hautpoul, les terrains ont été mis gracieusement à disposition par la Ville. Cette caserne reprend une architecture militaire typique de la période, déclinée dans de nombreuses villes de France.

La photographie ci-contre propose une perspective peu habituelle sur l’intra-muros et le « Château » des papes. Au premier plan, on distingue le chantier de construction (pavement de la cour ?) et deux pavillons aujourd’hui démolis. 

Après des travaux mélant à la fois restauration et construction contemporaine, l’ancienne caserne héberge désormais les services de la Préfecture. A la place des pavillons démolis se tient chaque semaine un marché.

Caserne Chabran
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Un hôtel des postes monumental

Le réseau d’équipement de l’administration des Postes s’est structuré dès 1870 afin de quadriller tout le territoire français. Le projet d’un nouvel hôtel des Postes pour Avignon est programmé dès la fin des années 1930, mais il est retardé par la guerre. Dans ce contexte, la municipalité cède une parcelle située à l’intérieur et en bordure des remparts, tout près de la porte de la République. Elle est entourée de la Chambre de commerce, de la rue Saint-Charles et de l’ancien hospice Saint-Louis.

 

Eugène Chirié, l’architecte régional des PTT en charge du projet, travaille sur un édifice qui doit exprimer la « grandeur du service public ». Le caractère imposant et massif du bâtiment repose sur les références à l’architecture classique : colonnes, pilastres, portique, symétrie et très grande régularité de la construction.

 

L’hôtel des postes d’Avignon occupe pleinement la parcelle en longueur qui lui a été dévolue. C’est un édifice particulièrement monumental. Cependant, on ne voit pas sa façade de 100 mètres de long lorsqu’on est à l’extérieur des remparts.

 

Des peintures de Pierre Ambroggiani ornent la salle des guichets. Elles représentent des paysages, des personnages et des édifices emblématiques d’Avignon et du Comtat Venaissin.

Hôtel des Postes

Colombages et encorbellements à Avignon

La photographie ci-contre nous montre une scène de vie urbaine au début du 20e siècle sur la place Carnot, alors que des travaux s’y déroulent.

 

La maison située à l’angle de la rue des Fourbisseurs et de la rue des Marchands daterait du 15e siècle. C’est le seul témoin subsistant à Avignon d’une architecture qui y fut très répandue au Moyen Âge : encorbellements, colombages, poutres saillantes.

 

Sa présence permet de mieux imaginer à quoi ressemblait la ville médiévale. Chaque étage de maison dépassait un peu plus sur la rue que le niveau inférieur. Ainsi, les immeubles se rejoignaient presque par le toit. Déjà étroites, les rues étaient donc particulièrement sombres. Ce type de procédé de construction fut interdit dans les années 1560, notamment dans le but de réduire les risques de propagation des incendies.

 

On appelle parfois cette maison l’hôtel Bernard de Rascas. C’est en fait le nom du propriétaire de la maison bâtie à sa place auparavant.

 

L’hôtel particulier a été restauré dans les années 2000.

Patrimoine regretté

Aujourd’hui encore, la place Pie est une place de marché, une place vivante et passante, un lieu de rencontres mais aussi d’échanges commerciaux.

 

Dans la seconde moitié du 19e siècle, non sans rapport avec les travaux urbains d’Haussmann à Paris, plusieurs maires d’Avignon entreprennent d’ « aérer » la ville. La percée de la rue de la République, entre la gare et la place de l’Horloge, celle de la rue Thiers ou encore le prolongement de la rue des Marchands marquent cette volonté de « modernisation » et d’ « assainissement » dans l’objectif de donner à Avignon les allures et les qualités d’une grande ville de son temps. C’est dans ce contexte et au prétexte d’agrandir la place Pie que la Commanderie Saint-Jean-le-Vieux est démolie en 1898-1899.

 

L’édifice connût de nombreux occupants successifs : commanderie des Templiers, commanderie des Hospitaliers, évêque de Florence, Pierre Corsini, dont ce fût la livrée cardinalice au 14e siècle, Bénédictines de Saint-Véran, Doctrinaires, militaires, etc.

Après le départ des militaires et le rachat de l’édifice par la Ville, on avait notamment établi dans ces bâtiments des écoles, une salle d'asile (équivalent d’une école maternelle), l’école de musique et de chant.

Il s’agissait de l’un des rares monuments de la ville qui avait conservé son architecture originelle médiévale : murailles crénelées, fenêtres géminées à meneaux, tourelles avec arcatures, etc. Il ne reste plus aujourd’hui que la tour.

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Commanderie des Hospitaliers
Hôtel Bernard de Rascas
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Un moulin témoin

Depuis la démolition du moulin de la Folie dans les années 1980, le moulin à eau du parc Chico Mendes est certainement le dernier témoignage, dans le territoire d’Avignon, des nombreuses usines hydrauliques situées sur le canal de Vaucluse.

 

Au 18e siècle, le Clos de la Sacristie comprenait déjà un moulin. Il servait au foulage et au blanchissage du linge. Y était également fabriquée de la poudre à partir de soufre, de charbon et de salpêtre.

Après un incendie en 1762, le moulin fut reconstruit. Il s’agissait alors d’une blanchisserie avec deux foulons servant à battre des pièces de tissus pour les assouplir. Ces foulons étaient alimentés en eau par une noria, roue associée à de petits récipients pour lever l’eau.

A la veille de la Révolution française, le moulin fut, semble-t-il, modifié pour moudre, ou plutôt « triturer », la garance et la transformer en poudre rouge, utilisée en particulier pour la teinture de textiles.

Une quarantaine d’années plus tard, le riche négociant et industriel Sixte Isnard racheta le moulin. C’étaient alors 10 meules et jusqu’à probablement 150 employés qui s’y affairaient.

 

Au cours du temps, le moulin a été transformé pour suivre les évolutions techniques et industrielles. Sa présence et sa reconversion en lieu de réunion pour les associations permettent de se souvenir du rôle primordial joué par le réseau des canaux à Avignon. S’ils servaient à l’irrigation pour l’activité agricole et maraichère, ils conditionnaient aussi tout un pan de l’activité industrielle du territoire en fournissant une énergie motrice indispensable.

Moulin Sixte Isnard

Un grand magasin de province

Sur le modèle parisien du Bon Marché, ouvert en 1852, les villes de province accueillent des grands magasins dès la fin du 19e siècle. Ces « grandes enseignes à comptoirs multiples » s’installent alors sur les nouveaux boulevards, que l’on veut ressemblants à ceux de la capitale. On y voit un emblème de la modernité de la cité.

 

Patrimoine commercial ? Inaugurées en 1904, les Nouvelles Galeries d’Avignon portent le symbole d’un tournant dans l’histoire du commerce de détail. Elles sont l’œuvre de Léon Lamaizière, architecte en chef de Saint-Etienne de 1885 à 1902, qui a construit, reconstruit, agrandi, ou aménagé, la plupart des Nouvelles galeries de France de la fin du 19e siècle aux années 1920, et de Tourtet.

 

La frise porte le nom des villes dans lesquelles les Nouvelles Galeries ont alors déjà ouvert une succursale : Montpellier, Reims, Marseille, Bordeaux, Rouen, Saint-Etienne, Valence, Châteauroux, Limoges et Besançon.

On retrouve à Avignon une architecture relativement classique, avec de larges baies vitrées encadrées de colonnes. Cette architecture est très représentative de l’ensemble des succursales des Nouvelles galeries.

 

Sur une surface de 1100 m2, les Nouvelles galeries sont bâties à l’emplacement de la maison Rolland de Beauville, devenue Imprimerie Aubanel aux 17e et 18e siècles.

Nouvelles galeries
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Édifice pour la salubrité publique

La rue de la Velouterie tient son nom de l’usine de velours qui y a été installée au 16e siècle. A deux pas des remparts, c’est aussi dans cette rue que l’on édifia les abattoirs de la ville, en 1817. Ils ont désormais laissé place à des immeubles de logements. Mais les dessins et photographies nous rappellent leur architecture bien particulière. Les ouvertures du rez-de-chaussée étaient surmontées de mascarons en tête de bétail. Ces sculptures peuvent d’ailleurs évoquer celles des Boucheries construites selon les plans de Jean-Baptiste Franque, rue du Vieux-Sextier. C’est sous Napoléon, au début du 19e siècle, que les « tueries », comme on disait alors, furent réglementées.

Il s’agissait bien sûr de garantir une sécurité sanitaire. Mais le but était aussi de mieux contrôler le commerce de la viande afin de garantir la levée des taxes qui y était liées. Ainsi, en 1831, une ordonnance du roi Louis-Philippe sur l’abattage des bestiaux et l’exercice de la profession de boucher et de charcutier à Avignon interdit les « tueries particulières » dans l’enceinte des remparts ailleurs que dans « l’abattoir public et commun » situé à une « extrémité de la commune », près de la porte Saint-Roch.

Il ne reste plus rien de l’ancien bâtiment, démoli vers 1970.

Abbatoirs
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L’église fortifiée de Montfavet

L’église Notre-Dame-de-Bon-Repos de Montfavet a été édifiée pour accueillir le monastère fondé par le Cardinal Bertrand de Montfavet.

Comme l’abbaye de Saint-Ruf, elle est fortifiée. Ses deux tours carrées crénelées cachent aussi les marques d’anciennes meurtrières. Bâtie au 14e siècle à 5 km des remparts, son architecture devait intégrer des éléments défensifs.

Cette église est un bel exemple du « gothique méridional » (austérité de la construction, utilisation de contreforts, étroitesse des ouvertures notamment). Elle n’a qu’une seule nef, aux vastes proportions.

 

La photographie ci-contre nous donne une vue et un recul sur l’édifice dont on n’a plus l’habitude aujourd’hui tant le paysage s’est urbanisé dans ce quartier d’Avignon.

Eglise de Montfavet
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Les débuts du logement social collectif à Avignon

La première partie de la cité Champfleury sort ainsi de terre. On l’appellera plus tard la « cité Louis Gros », du nom du maire de l’époque. Elle se compose d’un ensemble d’immeubles de quatre étages. Le rez-de-chaussée est destiné aux caves et, surtout, aux commerces. La construction des immeubles est aussi accompagnée par la création d’équipements publics. On voit ici déjà la volonté des urbanistes de créer, extra-muros, non seulement un quartier d’habitation, mais aussi un véritable quartier de vie.

 

Si le terme de « cité » est aujourd’hui connoté négativement, il avait une tout autre consonance dans les années 1930. Il s’agissait en effet de faire référence aux « cités jardins », chères aux réformateurs sociaux et aux philanthropes. L’urgence était de répondre à une importante crise du logement et de démolir les quartiers insalubres. Ainsi, les constructions des HBM Louis Gros, à la pointe du confort moderne, rendront possibles, en relogeant les habitants, les premières démolitions dans le quartier de la Balance…

 

Cette cité, pionnière, marque donc une évolution essentielle dans l’histoire urbaine et architecturale. Elle a valeur de témoin. Elle traduit les préoccupations d’une époque pour des conditions dignes d’habitat.

Ce n’est que pendant l’Entre-deux-guerres que l’histoire du logement social débute véritablement à Avignon. Il faut en effet attendre 1928 et sa « loi Loucheur », qui instaure des programmes d’aide à la construction, pour que la Municipalité crée son propre office d’HBM (habitat bon marché).

HBM Louis Gros
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Patrimoine en attente

Renseignez-vous sur les évolutions récentes de cet édifice !

Prison Sainte-Anne

Jusqu’en 2003, la prison Sainte-Anne d’Avignon comptait parmi les dernières prisons françaises implantées en centre-ville. Les détenus ont depuis été transférés dans une nouvelle maison d’arrêt, au Pontet. Mais on se souvient toujours des dialogues criés entre les prisonniers et leurs proches, postés sur la « face nord » du rocher des Doms...

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Élégante prouesse en béton armé

La protection du patrimoine scientifique et technique témoigne d‘une assez récente extension de la notion de patrimoine. L’idée est de pouvoir conserver et transmettre la mémoire d’une évolution fulgurante des techniques et des connaissances scientifiques.

 

La construction de la nouvelle rotonde SNCF en 1946 s’inscrit dans le contexte de l’après-guerre et de la Reconstruction : il fallait bâtir vite, bien et dans un souci d’économie des matériaux (pénurie d’acier notamment). Cet édifice a une valeur patrimoniale essentielle : celle de prototype. En effet, le modèle de rotonde SNCF avignonnais conçu par l’ingénieur Bernard Laffaille a été le premier d’une série de 19 rotondes édifiées en France entre 1946 et 1960.

La réussite de Bernard Laffaille réside dans la manière de couvrir l’édifice, de l’éclairer et d'en évacuer les fumées naturellement. Bernard Laffaille est l’inventeur  du « V Laffaille », une technique de « poteaux-coques » pliés en V.

 

La rotonde ferroviaire d’Avignon est inscrite à l’inventaire supplémentaire des monuments historiques depuis 1984 et labellisée Patrimoine XXe siècle notamment pour sa valeur de témoignage de l’avènement d’une technique, mais aussi pour l’élégance des lignes de construction d’un édifice qui se doit d’être, avant tout, fonctionnel puisqu’il s’agit concrètement d’une « remise à locomotives ».

Rotonde SNCF
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De la friche au patrimoine industriel

On parle souvent de l’histoire agricole et maraichère d’Avignon, mais on oublie parfois qu’elle fût aussi une ville d’usines. Quelques traces subsistent. Au bord de la route touristique, à l’extrémité du parking des Italiens, le vestige d’une vaste zone industrielle avignonnaise est largement boudé, renié, décrié. Pourtant, il est digne d’intérêt.

La photographie nous montre un bâtiment d’usine désaffecté. Cette usine revêt une forme industrielle typique, avec son toit en sheds (en « dents de scie »).

La SIPRA (Société Industrielle Pour la Rayonne à Avignon) s’installe dans le quartier de Bonaventure en 1924 et emploiera jusqu’à plus de 700 personnes simultanément pour fabriquer de la soie artificielle. L’usine cesse sa production à la fin des années 1950, détrônée par le nylon. Le site industriel accueille plus tard la Société industrielle de Résine et Plastiques, puis une unité de fabrication des Plâtres Lafarge jusqu’en 1998. Cette infrastructure a ainsi représenté le cadre quotidien, celui du travail, de générations d’ouvriers.

Que devient un espace qui perd sa fonction sans qu’on lui en attribue officiellement une autre ? Ici les tags et les graffitis ont investi les murs.

Au 19e siècle, lorsqu’on parlait de patrimoine, on désignait toujours, de fait, les bâtiments abritant les puissances religieuses, politiques ou financières. Leur architecture et leur décor matérialisant le pouvoir et la richesse de ceux qu’ils hébergent, ces édifices ont longtemps accaparé l’intérêt, l’admiration et la démarche de protection. Le 20e siècle a progressivement étendu la notion de patrimoine à des domaines plus profanes et plus quotidiens. Le monde du travail et de l’industrie en fait partie, mais tardivement et non sans polémique.

 

Si les exemples de reconversion de sites industriels en lieux culturels, artistiques, en logements ou en bureaux ne manquent pas, c’est encore loin d’être la règle, et, dans la plupart des cas, on rase l’usine pour utiliser la « réserve foncière » en parking avant de la construire à neuf.

Ancienne usine SIPRA
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Saint-Joseph Travailleur ou la déclinaison des triangles

Eglise Saint-Joseph Travailleur

Le 20e siècle a lui aussi connu une série d’édification d’églises. Pour accompagner l’urbanisation de quartiers périphériques et l’augmentation du nombre d’habitants, un certain nombre d’équipements collectifs sont construits. A Avignon, l’église Saint-Joseph Travailleur vient répondre à une véritable demande de la communauté catholique installée au sud-ouest des remparts, dans un secteur longtemps inondable et rendu constructible au début des années 1950. Une chapelle-hangar fait office de lieu de culte à la fin des années 1950. Elle ne peut répondre à la demande augmentée par les rapatriés d’Algérie en 1962...

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Patrimoine insalubre ?

Il est question de démolir la Balance dès le « plan d’assainissement et d’embellissement d’Avignon » de 1921. Pendant plusieurs décennies, la question de la « résorption de l’habitat insalubre » revient régulièrement au cœur des débats. Dès les années 1930, mais surtout après-guerre, la municipalité mène une politique d’achat des maisons délabrées pour les raser...

Au pied du palais pontifical, la Balance demeure le quartier principal d’Avignon jusqu’à l’avènement du chemin de fer : la gare oriente alors Avignon vers son sud. Peu à peu, le quartier de la Balance est habité par une population plus pauvre. Sous le vent, à proximité immédiate du Rhône, mal entretenu, le bâti s’y dégrade.

Quartier de la Balance
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L’exposition virtuelle Épatant patrimoine : questions de protection est la transposition d’une exposition temporaire réalisée par les Archives municipales d’Avignon. Inaugurée à l’occasion des Journées du patrimoine de 2013, à l’aune d’une thématique nationale intitulée « 1913-2013 : 100 ans de protection », l’exposition initiale a été présentée pendant 9 mois (2013-2014) dans la cour intérieure et sur les murs extérieurs du bâtiment sous la forme de 46 focus. Elle a été accompagnée et prolongée par un livret d’exposition.

 

NB : Nous avons fait le choix de ne pas mettre à jour les textes de l’exposition initiale. Certaines évolutions récentes ne sont donc pas mentionnées.

Crédits

Au sein des Archives municipales d’Avignon, chacun a contribué au projet d’exposition. Toute l’équipe en est vivement et chaleureusement remerciée.

Les photographies cotées en 67Fi sont en dépôt aux Archives municipales d’Avignon. Elles sont propriété de la Fondation Calvet à qui nous adressons notre sincère gratitude.

Une production Ville d’Avignon

Réalisation originale 

Archives municipales, septembre 2013

Transposition virtuelle 

Archives municipales, août 2020

Commissariat d’exposition

Sylvestre Clap (directeur des Archives d’Avignon)

Aure Lecrès (adjointe du directeur, cheffe du service des publics)

Textes

Aure Lecrès

Recherches iconographiques

Sophie Ambrosio et Yves Schleiss

Documentation

Martine Bricard et Aure Lecrès

Numérisation et prise de vue

Sophie Ambrosio et Yves Schleiss

Conception graphique du plan de situation

François Ségura (service municipal du Plan)

 

Transposition virtuelle

Allison Guiraud et Aure Lecrès

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